Les premiers pas dans la réduction des déchets

Pour faire écho au précédent post, où je parlais de se débarrasser du superflu, cela peut comprendre également la réduction des déchets, sujet dont nous allons parler aujourd’hui ! Chaque français produit 568 kg de déchets par an (ordures ménagères, déchets destinés au tri, et objets destinés à la déchetterie compris). Les emballages ménagers représentent chaque année 5 millions de tonnes (Source ADEME). Et bien que le recyclage progresse (68 % de ces emballages en 2020), tout le monde n’a pas encore le réflexe du tri (à noter aussi que certains emballages ne peuvent entrer dans les flux de recyclage).

Si je suis moi-même préoccupée par les problématiques environnementales (je privilégie les transports en commun et le train lorsque c’est possible, je suis attentive à ma consommation d’eau et d’électricité, je fais attention depuis des années à ma génération de déchets : je privilégie le vrac lorsque c’est possible, je consomme dans l’absolu assez peu, etc.) je me rappelle avoir été dépitée lorsque j’avais lu il y a quelques années le livre « zéro déchet » de Béa Johnson. Cette française qui vit aux Etats-Unis avec sa famille a réussi à réduire sa génération de déchets à … un bocal par an ! Je suis d’ailleurs dépitée de voir la quantité de déchets que je génère malgré les efforts que je peux faire. De quoi décourager les plus motivés d’entre nous !

Que ce soit avec une vision très court terme, ou plus long terme en pensant aux générations suivantes ou à vos propres enfants, il y a parfois la volonté de faire évoluer ses habitudes, sans savoir forcément comment faire, ni par où commencer. Est-ce que cela va être un casse-tête ? Est-ce que cela représente un emploi à plein temps en soi ? Est-ce compatible si l’on a des enfants ? Si l’on vit en ville et non à la campagne ?

Julie, que j’ai découvert au travers de son compte Instagram julie.rime.avec.écologie (anciennement « ma vie presque zéro déchets ») nous livre aujourd’hui son expérience.

– Julie, peux-tu brièvement te présenter ?

J’ai 36 ans et j’habite en proche banlieue parisienne. Je vis en appartement avec mon mari et notre fille de 7 ans, mais nous avons la chance d’être en rez-de-jardin avec un terrain de 150 m2, ce qui est appréciable en ville !

Je suis webmaster pour un établissement culturel. Je suis passé l’an dernier à 80% car j’aspire à avoir du temps pour voir ma fille grandir. Je travaille aussi pas mal à la maison depuis le début du COVID ce qui me fait gagner en temps de transport.

– Si l’on peut résumer les choses, tu t’inscris entre autres dans une démarche zéro déchet, et de consommation responsable. Peux-tu nous expliquer les principales raisons qui t’ont amenée à cette démarche ? 

J’étais déjà très sensible à l’écologie, ayant grandi à la campagne, mais je me suis vraiment lancée dans la démarche zéro déchet il y a 3 ans et demi. Je me posais beaucoup de questions sur notre façon de consommer, ma fille avait alors 3 ans. On vivait juste au-dessus d’un supermarché, ce que je trouvais à l’époque super pratique car il n’y avait qu’à descendre pour acheter ce dont nous avions besoin. J’achetais déjà des fruits et légumes bio, mais ils étaient tous sur-emballés de plastique ce qui générait énormément de déchets. Je trouvais insensé de descendre 3 sacs poubelles par semaine ! Après avoir lu pendant l’été 2018 le livre « La famille zéro déchet », j’ai décidé de changer radicalement notre manière de faire les courses…

– Concrètement, comment les choses se sont faites ?

J’ai été assez radicale. J’ai commencé par la salle de bain : ma « routine » étant très simple, j’ai juste remplacé les cotons démaquillants par des carrés de tissus lavables, trouvé du shampoing en vrac, remplacé nos brosses à dents par du bois et adopté des pains de savon plutôt que le gel douche. On utilise tous les 3 les mêmes produits, ça facilite grandement la tâche ! Je ne pensais pas franchir le cap pour les protections périodiques lavables mais aujourd’hui je ne reviendrais plus en arrière ! (on parle ici de protections lavables, mais depuis de nombreuses marques se sont lancées dans les culottes menstruelles).

En cuisine j’ai cessé d’acheter du sopalin pour utiliser les essuie-tout en tissu que m’a cousu ma sœur, et c’est côté achats alimentaires que le changement a été plus long et chronophage.   

Alors que je ne jurais que par le supermarché de mon immeuble, j’ai découvert des boutiques formidables dans la rue d’à côté. Vrac, magasin bio, petits commerçants, j’avais tout à portée de main. Je me suis alors munie de sacs à vrac en coton, j’ai récupéré les bocaux des conserves et je pouvais alors tout acheter comme ça sans générer de déchets. A l’époque, je mangeais encore un peu de viande, alors j’allais chez le boucher avec mon tupperware, ce qui n’a jamais posé de problème. Idem chez le fromager.

En 6 mois, nous n’avions quasiment plus de poubelles. Mais j’ai fini par devenir dingue car cela m’a demandé beaucoup d’énergie pour tout changer comme ça d’un coup. Je me retrouvais à l’époque à devoir faire ½ heure de métro pour acheter mon shampoing en vrac par exemple ! J’avais alors un planning chargé car je travaillais encore à temps plein. Suite au pétage de câble, j’ai un peu lâché sur certaines choses en étant plus indulgente avec moi-même. Le temps de digérer les autres changements et de pouvoir passer à la suite.

©julie_rime_avec_écologie

– As-tu rencontré des freins concrètement lorsque tu as commencé à mettre certaines choses en place ? ou des réticences de certains commerçants selon tes demandes ? 

Non, pas vraiment. Aucun commerçant n’a jamais refusé de prendre mon contenant, même s’ils étaient parfois surpris de ma demande au début. A noter qu’ils n’ont pas le droit de refuser suite à la loi 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire. Si tel est le cas, il est possible de signaler le commerçant à sa mairie, qui le contactera pour un rappel à la loi.

Le seul frein que je rencontre vient des autres, de l’entourage. Je n’ai pas eu spécialement de remarques de la famille ou des amis, mais parfois ils ne comprennent pas et pensent que cela ne sert à rien ! Ma mère par exemple a eu du mal au début avec mon végétarisme. Elle comprend pourquoi je le fais mais ça lui a demandé d’adapter les plats qu’elle prépare quand on vient rendre visite à mes parents. On devient alors le/la relou(e) de service. Après quelques mois, et surtout en donnant des idées et en cuisinant avec les gens, ça passe tout seul ! De nouvelles portes s’ouvrent même à eux, il suffit d’un peu d’ouverture d’esprit.  Mais cela reste particulièrement difficile à cette période de l’année où la viande, le saumon et le foie gras s’invitent à toutes les tables. Du coup j’amène mes plats végétariens (pour moi seule ou à partager) et souvent on me dit : « oh mais ça a l’air super bon ce que tu manges » !  Je me suis rendue compte à Noël par exemple, que sur 3 repas en famille, j’avais mangé beaucoup plus varié et moins lourd que les autres, où les mêmes plats reviennent inlassablement.

– Est-ce que c’est toi qui gères la logistique à 100% ou ton mari a adhéré également à la chose et partage la « charge mentale » qui peut être associée à cette organisation ? 

Je suis clairement moteur sur le sujet dans la mesure où c’est moi qui fais les courses et prépare à manger (mais j’adore cuisiner !). Mon mari travaille beaucoup, mais il participe davantage sur d’autres plans, comme l’entretien de l’extérieur, du jardin et le repassage. Chacun fait selon ses compétences et ses goûts, c’est notre équilibre. Il n’a jamais eu de réticences vis-à-vis de la démarche et m’a toujours suivie dans ces choix de consommation. Le seul point négatif peut-être pour lui est que je limite au maximum les voyages en avion. On privilégie le train et la voiture mais je sais qu’il aimerait voyager davantage et plus loin. On s’autorise 1 voyage en avion tous les 3 ans. La pandémie nous a fait prendre du retard, et ce n’est pas pour me déplaire 🙂

– Et ta fille, comment perçoit-elle les choses ? 

Ma fille a conscience que l’on vit différemment de la plupart des gens, mais elle adhère totalement à cette démarche. Elle ne m’a jamais parlé de remarques particulières qu’elle aurait pu avoir à l’école de la part de ses camarades de classe. Après, il n’y a pas d’interdit. Je sais par exemple que ma mère lui offre des friandises industrielles au chocolat (on ne citera pas la marque !) et je suis ok avec ça. La seule chose que je refuse ce sont les fast foods ! (et en plus ce n’est pas bon !). Pour Noël elle n’a eu que de l’occasion, et c’est une petite fille heureuse d’offrir une seconde vie à des jouets.

©julie_rime_avec_écologie

– Tu es donc également végétarienne, qu’est-ce qui t’a menée à cette transition ?

J’ai initié la démarche zéro déchet avant de devenir végétarienne, même si je mangeais déjà très peu de viande par dégoût. J’ai fait ce choix au début pour réduire encore davantage notre empreinte carbone, en plus du zéro déchet. Puis pour notre santé, en regardant des documentaires et en lisant beaucoup sur le sujet. La troisième raison est la souffrance animale, que je ne cautionne pas. Jamais je ne tuerais un animal, je n’ai donc pas envie de demander à quelqu’un de le faire à ma place. Je suis aujourd’hui végétarienne (ni viande ni poisson) depuis 2 ans. Mon mari et ma fille mangent encore un peu de viande à l’extérieur, mais c’est très rare.  

A notre arrivée dans cet appartement, 6 mois avant le début du COVID, rien n’était aménagé dans le jardin. Nous avons fait un coin potager de 14m2, où nous faisons des plantations puis des conserves, mais cela ne nous permet pas d’être autonomes sur ce plan, ce qui serait mon rêve !

– On pourrait penser que le zéro déchet c’est un travail à temps plein, comment fais-tu pour gérer tout de front, avec ton activité professionnelle et la vie de famille ? 

Cela demande de l’organisation mais globalement, les journées font 24h pour tout le monde. Tout dépend d’où on place le curseur de ses priorités. Si je pouvais donner un conseil, c’est de changer une chose à la fois.  Il faut prendre le temps d’ancrer les nouvelles habitudes. C’est difficile car il faut reprendre les choses à l’envers, tout repenser et se déconstruire. Cela peut être au début de petits détails, comme demander à la boulangerie son pain sans sac en papier. Puis les choses vont se faire progressivement. J’ai tendance à être radicale lorsque j’entreprends quelque chose et j’ai voulu tout changer d’un coup lorsque je me suis engagée dans cette démarche. Résultat, j’ai fini par péter un câble. J’ai alors lâché sur certaines choses, avant de poursuivre les changements un peu plus tard. 

Côté alimentation, je cuisine tout maison. Je cuisinais déjà beaucoup mais cela s’est amplifié à la naissance de ma fille. Ce qui m’a permis de gagner beaucoup de temps, c’est le batch cooking, que je pratique depuis 2 ans environ (NDLR : le batch cooking consiste à concentrer la préparation des repas sur un ou deux créneaux dans la semaine seulement. Les différents plats ou aliments de base (riz, pâtes, crudités), sont préparés en quantités un peu plus importantes. En assemblage en fonction des envies, ils auront juste besoin d’être réchauffés ou finalisés au moment du repas (gratinage des plats par exemple, assaisonnement des crudités). Concrètement, cela représente pour nous (famille de 2 adultes et 1 enfant) 2h30 heures de cuisine le dimanche, et 1h30 le mercredi (auparavant je préparais le dimanche pour toute la semaine et je passais 4 heures en cuisine). Cela me permet, les jours où je travaille, de n’avoir qu’à réchauffer et de pouvoir passer un peu de temps avec ma fille à lire ou faire un jeu plutôt qu’à la préparation du repas. Pour la cuisine, le fait de ne pas toujours vouloir faire des choses différentes diminue un peu la pression : ne pas hésiter à décliner des basiques comme des cookies, des lasagnes ou des purées avec différents légumes, modifier la forme des gâteaux… !

Cependant, je priorise les choses. Si je mets beaucoup l’accent sur l’alimentation, je ne fabrique presque pas de produits ménagers ou cosmétiques. La seule chose que je fabrique est ma lessive, mais avec une recette très basique à base de savon noir. Ça me prend 2 minutes par mois. Je ne veux pas passer mes samedis à jouer à l’apprentie chimiste ! (NDLR : en matière de ménage, nul besoin de produits très complexes de toute façon, vinaigre blanc, savon noir, bicarbonate de soude par exemple vous permettront facilement d’entretenir la maison !)

Illustration d’un batch cooking de Julie. ©julie_rime_avec_écologie

– Concrètement, comment t’organises-tu pour les courses ?

Aujourd’hui, je fais mes courses 2 fois par semaine en magasin bio pour les fruits et légumes (NDLR : si vous habitez en province, n’hésitez pas à privilégier les circuits courts, comme les AMAP, ou pourquoi pas directement auprès des producteurs lorsque c’est possible ! Et si vous avez un jardin, alors c’est le saint graal si vous avez déjà un potager ou envie de vous lancer !).

Une fois par mois environ je vais au Day by Day, un magasin de vrac pour toute l’épicerie sèche, l’hygiène corporelle et l’entretien de la maison (ici celui de Nanterre, cette chaîne de magasins propose uniquement du vrac (alimentaire et non alimentaire), avec la particularité que vous amenez vos propres contenants (sacs en tissu, récipients, boites, bouteilles…), l’objectif étant de limiter au maximum les déchets). J’aime ces petits commerces car on peut y discuter et échanger. Rien à voir avec la grande surface !  

Enfin, je continue à aller un peu en supermarché pour certains achats (papier toilette, huile et vinaigre, quelques conserves en verre mais je fais très attention à la provenance des produits : que du français.

©julie_rime_avec_écologie

– Certains pourraient dire que cette démarche à titre individuel est une goutte d’eau dans l’océan au plan environnemental (sauf à ce que bien sûr un nombre grandissant de personnes s’y engagent) ?

Je dirais qu’il faut le faire avant tout pour vivre en cohérence avec ses valeurs, mais pas en se disant que ça suffira pour sauver la planète (car malheureusement les actions d’individus isolés gardent effectivement un impact minime.. sauf à ce que nous soyons à terme très nombreux à avoir cette même démarche, mais la route est longue !). C’est un premier pas pour pouvoir aller plus loin et s’engager, l’amener au travail, en parler autour de soi. J’ai commencé par faire du zéro déchet, et désormais à la maison on ne mange plus de viande ni de poisson, dont l’impact est énorme. Il faut trouver sa porte d’entrée vers l’écologie, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon de le faire.

Mon conseil est d’y aller étape par étape, et surtout ne pas culpabiliser (ce qui est loin d’être évident, notamment avec les réseaux sociaux qui vous donnent l’impression de ne pas être à la hauteur et de ne jamais en faire assez !). Tout est faisable, il suffit de ne pas se mettre la pression et d’être bienveillant avec soi-même !

Un grand merci à Julie d’avoir accepté de répondre à ces questions ! En espérant que cela puisse vous guider dans cette voie et vous donner des pistes pour vous lancer. Tout petit geste est déjà appréciable ! N’hésitez pas à faire également vos retours d’expérience sur le sujet. Et si vous avez un compte instagram, n’hésitez pas à suivre son compte julie_rime_avec_ecologie ! 🙂

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