J’ai assisté la semaine dernière à la projection du documentaire « Le cerveau des enfants », certains d’entre vous l’ont peut-être déjà vu, suivi d’un débat en présence de la directrice de l’Education des crèches Babilou.
Ce documentaire aborde les neurosciences de façon vulgarisée, et explique comment notre enfance structure notre cerveau.
Le cerveau gauche se développe après le cerveau droit
Pour rappel, le cerveau droit (associé à l’intuition, les émotions, l’apprentissage), se développe avant le cerveau gauche (analytique, logique, raison), qui lui ne se développe pas avant la 2ème année. Le cerveau droit est indispensable pour les fonctions de survie alors que le gauche est lié aux fonctions du langage. Le cerveau droit gère aussi les interactions sociales, la communication non verbale, le stress. Le cerveau gauche est le plus utilisé à l’âge adulte chez une majorité d’entre nous.

Le cerveau des enfants passe de 400 grammes à la naissance à 1 kg à un an. C’est une période critique, où le cerveau est très plastique. L’autre période très importante pour la croissance du cerveau étant l’adolescence.
Les émotions d’une grande importance
La communication émotionnelle façonne bien plus les tout petits que les mots employés. Ce qui importe est d’être, et non pas de faire. Pour que l’enfant connaisse un bon développement, il doit avoir connu au moins un attachement sécurisant avec un adulte, qui lui a fait comprendre qu’il sera protégé et que ses besoins seront comblés. Dans le cas contraire, sa mémoire implicite retiendra qu’il ne peut pas compter sur les autres. Vous avez peut-être déjà vu le test du marshmallow (où l’on propose à de jeunes enfants filmés en caméra cachée un marshmallow, ou davantage de marshmallows s’ils ont la patience d’attendre). Et bien certaines équipes ont poussé plus loin l’expérience : l’un des groupes d’enfants doit faire face à des déceptions consécutives (l’enfant choisit au départ d’attendre car la promesse est alléchante, et au final l’adulte ne tient pas sa promesse). L’étude montre que les enfants qui ont dû faire face à des déceptions consécutives finiront pas craquer plus tôt au bout de X déceptions et auront plus de mal à faire confiance aux personnes autour d’eux.
Quant aux enfants qui font des colères qui semblent incontrôlables, notre réflexe est souvent de penser « mais que font les parents ? ». Et bien l’éducation ne serait pas forcément uniquement en cause. Ces crises irrépressibles seraient plus fréquentes chez les enfants car la partie supérieure de leur cerveau (cortex et cortex préfrontal, d’où dépendent la capacité à raisonner et la prise de décision réfléchies, l’empathie…) n’a pas fini de se développer. Ainsi l’enfant n’a pas encore les capacités nécessaires pour faire face à la déception (bon ceci dit je n’ai jamais fait de colère de ma vie, ma famille confirme, et je connais aussi beaucoup d’enfants qui n’en ont jamais fait non plus). Le fait de menacer l’enfant pendant ces crises reste inefficace, car cela ne développe pas leur compétence et les crises continueront. L’enfant aurait à ce moment besoin de soutien, de proximité et d’empathie. Dans ce cas son cerveau passe d’un état réactif à un état réceptif et il devient alors possible de discuter avec lui et de trouver des solutions.

Les enfants sont des machines à imiter
Jouer à la poupée, à la dînette, etc… C’est en imitant que l’enfant apprend. Ainsi, les neurones miroir ont une importance pour la capacité d’apprentissage et la capacité à compatir pour autrui. Plus on imite les autres, plus on aura d’empathie pour eux.
Dans d’autres pays, on retrouve dans le milieu scolaire bienveillance et respect des enseignants envers les enfants. Et grâce à l’effet miroir, les enfants vont se comporter de même, même dans écoles situées dans des quartiers défavorisés.
Impliquer le corps dans l’apprentissage
Il a aussi été souligné que l’approche corporelle de l’apprentissage est essentielle. Une expérience menée à l’UCLA Lab School de L.A. a placé les enfants dans le rôle d’abeilles pendant toute une journée, le jeu consistant à reproduire la pollinisation et la collecte de pollen vers la ruche. Les enfants se sont ainsi sentis beaucoup plus concernés et empathiques envers les abeilles. Impliquer le corps rend l’apprentissage plus facile. Reste qu’en France, l’apprentissage se fait quasiment exclusivement assis derrière un bureau (et le niveau scolaire ne cesse de se dégrader). Or, pour apprendre, il faut faire. Il est indispensable d’apprendre de nos erreurs, et de pouvoir expérimenter.
Autre point intéressant : dans notre système scolaire, la difficulté est considérée comme négative, tout comme l’échec. Alors que si elle est considérée comme positive, elle facilite l’apprentissage. C’était assez frappant de voir une femme américaine (qui plus est, californienne) qui décrivait comment sa petite fille, à l’origine très enthousiaste en tout, était revenue après plusieurs années en France, très morose et peu enthousiaste sur les choses du quotidien « elle est devenue un peu française » disait-elle. De quoi faire réfléchir sur notre culture (les français ne sont pas réputés râleurs pour rien) et notre système scolaire. Avis corroboré par le témoignage d’une personne dans la salle à la fin du film. Des enseignants beaucoup moins encourageants en France et une ambiance scolaire plus délétère. On ne considère pas non plus que tout est accessible à tout le monde (le milieu social est souvent déjà très déterminant).

Valoriser les efforts fournis plutôt que le résultat
Il a été expliqué que dire à des enfants qu’ils sont intelligents crée des esprits fixes. Les enfants ne voudront plus tenter des choses plus difficiles par peur de l’échec (je me cantonne à ce pour quoi je sais être bon). Ainsi, si l’enfant essaie une nouvelle activité et n’y est pas bon de suite, il va vite s’en détourner, ce qui est très limitant dans l’apprentissage. En d’autres termes, mieux vaut valoriser l’effort fourni, les stratégies, la concentration, etc, que la réussite ou le succès eux-même.
Ainsi, faire des compliments d’encouragement au bébé de 1 à 3 ans conditionne le goût pour les défis 5 ans plus tard. La façon dont les parents réagissent face aux échecs des enfants est aussi primordiale pour une bonne progression. S’ils expliquent que tout échec est utile, l’enfant va développer un état de croissance. En revanche, si les parents anxieux rassurent faussement l’enfant avec un « ce n’est pas grave », cela va développer un esprit fixe chez l’enfant. L’enfant se dit que si ses parents sont aussi inquiets, c’est que l’incapacité est figée en lui. La partie du cerveau qui traite les erreurs ne se mettra pas en route et l’enfant ne cherchera pas à les corriger. Ainsi, l’esprit fixe évitera à tout prix les erreurs.

La pleine conscience pour les enfants
Chez les enfants, les émotions gagnent toujours sur l’attention. Pour améliorer leur attention, il faut donc apprendre aux enfants à vivre en paix avec leurs émotions. C’est là qu’intervient la pleine conscience (lire aussi cet article que j’avais écrit sur la MBSR : Méditation de pleine conscience) : faire attention à ce qui se passe au moment où cela se passe, sans jugements pré-existants. Prendre conscience de son corps permet de le calmer et de calmer son esprit. On aurait pensé la pleine conscience réservée aux adultes ? et bien pas du tout. Les petits pratiquent spontanément la pleine conscience (excepté peut-être les enfants dont on dit qu’ils sont dans la lune ? 😉 ). Ils sont pleinement présents dans l’instant.
On peut aussi apprendre aux enfants la pleine conscience physique. Des exemples édifiants aux Etats-Unis ont été montrés. A l’aide d’exercices ou jeux de courte durée, souvent basés sur l’expérience physique, on incite les enfants à être pleinement attentifs à leurs sensations, de toucher, auditives, gustatives… ce qui va aussi petit à petit forcer la concentration. Le chant est aussi très utilisé. C’était assez étonnant d’entendre des enfants de 5-6 ans expliquer comment la méditation les aidait à trouver plus facilement le sommeil ou évitait à leur esprit de papillonner. 🙂
En conclusion, le cerveau des enfants est d’une importante plasticité ; le rôle des parents sera de les accompagner pour révéler leur plein potentiel.
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