Vous l’aurez peut-être compris, l’objet de mon séjour il y a 15 jours à PranaHvital, centre de jeûne et bien-être créé par Pierre, Naturopathe et pharmacien, était un jeûne. Je vous donne ici un retour sur cette expérience ! A noter donc qu’il s’agit ici de MON ressenti, de MES réactions.. chacun vivra les choses d’une manière différente.
Pourquoi le jêune ?
L’idée du jeûne me titille depuis un bon moment. Je pratique de temps à autre le jeûne intermittent (pas de prise alimentaire pendant 16 heures), mais je n’avais jamais expérimenté un jeûne de plus de 36 heures.
Forcément en cursus de naturopathie, la tentation a été grande, mais je sortais d’une période de fatigue intense (je n’étais sans doute pas passée loin du burn-out). Car oui, un jeûne long ne s’improvise pas. Et jeûner demande d’avoir un niveau d’énergie suffisant. J’entends d’ailleurs encore l’une de nos enseignantes nous dire (nous étions une promo de plus de 60 personnes tout de même, ayant une hygiène de vie sans doute plutôt meilleure que la moyenne de la population), que tels qu’elle nous voyait, peu d’entre nous avaient l’énergie suffisante pour jeûner. Et elle n’avait sans doute pas tort. Car un jeûne plus long (au-delà de 3 jours) se prépare. Il doit être précédé d’une descente alimentaire (on supprime progressivement certains aliments), suivi d’une reprise alimentaire (où en sens inverse on réintroduit progressivement certains aliments), et l’on doit disposer de suffisamment d’énergie. Certains d’entre nous l’ont d’ailleurs expérimenté : grosse fatigue dans les semaines suivant le jeûne, ou « tombés » malades juste après le jeûne (si certains naturo associent parfois un rhume à une crise curative… j’y vois surtout le signe que le système immunitaire est affaibli), ou troubles digestifs car la reprise alimentaire a été trop brutale. Et oui, les élèves de naturo sont leurs propres cobayes ! 😉
Donc pendant tout le cursus, jeûner a été pour moi exclu. Et puis une fois ma formation achevée, avec diverses activités professionnelles mais me permettant une certaine flexibilité, la fatigue s’est petit à petit amenuisée et l’idée a réapparu. Je pensais au départ faire une semaine de jeûne à l’automne (les changements de saison comme printemps et automne sont assez propices), et j’ai finalement été empêchée par des contraintes professionnelles. Je me rappelle avoir croisé à l’automne sur un salon à Paris Pierre, de PranaHvital, à qui j’avais confié ma déception. Sa réponse a été « C’est que ce n’était pas le moment. Quand ce sera le bon moment, cela se fera ». ❤
Et le bon moment a été en ce début du mois de mars. Après avoir fait un séjour l’an dernier en tant que stagiaire à Pranahvital (j’avais assisté à une semaine avec des curistes), je savais que le jour où je me lancerais, ce serait ici, tant ce lieu inspire le calme et la sérénité. Et puis dès notre première rencontre, j’ai tout de suite accroché avec le discours de Pierre, loin des extrêmes que l’on peut rencontrer dans ce milieu. Pierre est un naturopathe épicurien, qui aime la vie et la célèbre de toutes les façons, pour qui l’équilibre est fait d’une bonne hygiène de vie de base, ce qui permet au corps de gérer les écarts de temps à autres. « Le corps a besoin de ces écarts, afin de stimuler un peu le système digestif. Les personnes qui ont une alimentation orthorexique en permanence se rendent compte au moindre écart qu’elles ne digèrent plus rien ». Bref, son discours modéré et sensé m’avait bien plu.
J’ai fait le choix de ne pas jeûner chez moi, option qui pourrait paraître à certains plus pratique ou économique. D’une part car mon côté prudent a fait que je préférais être encadrée pour cela : Pierre a une longue expérience du jeûne, est pharmacien, a l’habitude de voir des crises curatives (car oui, parfois des manifestations très désagréables peuvent survenir pendant le jeûne, selon ce que l’organisme a à éliminer). Et d’autre part, car je pense que j’aurais été plus facilement tentée de rompre le jeûne en le pratiquant seule chez moi. Car l’avantage des centres de jeûne est que la journée est ponctuée d’activités. Ici ce fut yoga, réflexologie, relaxation, méditation, ballades dans la campagne (sans aller jusqu’à la vraie rando comme dans les centres de jeûne et randonnée). Il est aussi possible d’accéder à des pratiques très utiles : le sauna, qui va favoriser les éliminations, le bol d’air jacquier, des massages si vous le souhaitez. En résumé, c’est une parenthèse pour soi, loin du travail (quoique j’avais au départ prévu de travailler à distance pour l’un de mes jobs mais ai finalement renoncé), hors du milieu familial (très difficile à concilier par exemple si vous avez des enfants, car il est très probable que vous deviez continuer à préparer les repas, etc, ce qui peut être difficile lorsque l’on doit jeûner soi-même).
J’ai suivi ce jeûne à double titre :
- Personnel car je souhaitais voir si cela me permettait de réguler certains troubles présents depuis plusieurs années
- Professionnel car je ne me vois pas parler du jeûne, et encore moins le conseiller potentiellement, sans l’avoir expérimenté moi-même ! (vive l’empirisme ! 🙂
La préparation au jeûne
Pour un jeûne d’une semaine, il est recommandé une semaine de descente alimentaire, où certains aliments sont supprimés progressivement pour ne plus consommer la veille du jeûne que des légumes cuits et des jus de légumes (cf article spécifique qui suivra). Comment j’ai vécu cette semaine : En toute honnêteté, je dois avouer que j’ai déjà trouvé cette semaine difficile. J’ai essayé de la suivre au plus près mais ayant eu dans la semaine plusieurs déjeuners ou dîners à l’extérieur, dans des lieux où il n’était pas forcément facile de choisir les aliments appropriés, cela n’a pas été évident. Il a aussi fallu se déshabituer du sucre (qui vous le savez sans doute maintenant, est très addictif, et dont la suppression induit les mêmes sensations qu’un sevrage !), même si je n’ai pas une alimentation complètement déséquilibrée par rapport à la moyenne. Ce qui a été dur également et a été mon tort, c’est que j’ai conservé à peu près les mêmes portions qu’habituellement, de fait j’avais très souvent faim ! D’où le fait que j’ai trouvé cette semaine difficile, ce qui m’a fait douter de mes capacités à jeûner au-delà de 24 heures ! A la fin de la semaine de préparation, j’avais perdu 1 kilo.
Le jeûne lui-même
J1 : Mon départ pour PranaHvital s’est fait en train depuis Paris. Le trajet en transports en commun jusqu’à la gare du Nord a déjà été un peu difficile, car ayant peu mangé la veille et étant à jeun le matin, je ressentais déjà les signes d’une hypoglycémie. Finalement, une fois arrivée au moulin de Grouches, les choses se sont calmées. Il faut dire que l’on est vite pris par les activités, ce qui détourne l’attention de la sensation de faim (ou pseudo-faim). A peine arrivées (nous n’étions que des femmes dans notre groupe, de jolies femmes ! 🙂 ), que nous filions au sauna (dans la tradition naturopathique, à lire ici) ! Les plus courageuses se rafraîchissaient directement à l’eau du ruisseau dans le jardin entre chaque passage au sauna ! Suivirent balade, puis cours de yoga. Lors des moments consacrés au repos, aucune envie de dormir en revanche, l’énergie était normale en ce premier jour. Lorsque la sensation de faim se faisait sentir, le simple fait de boire de l’eau ou une tisane permettait de la calmer (le Dr Whilelmi de Toledo, à la tête de la fameuse clinique Buchinger en Allemagne, décrit d’ailleurs que dans notre société d’abondance où l’on mange très fréquemment, on ne connait plus la « vraie » faim, qui ne survient que lorsque le corps n’a plus de réserves).
Le grand moment de ce premier jour fut… la purge ! S’il y a bien un moment que je redoutais, c’était celui-ci (même si j’avais déjà fait une préparation à une coloscopie par exemple, le principe étant le même). J’ai choisi d’utiliser du chlorure de magnésium (il est aussi possible de prendre du sulfate de magnésium qui serait un peu moins irritant pour la muqueuse intestinale) (prudence si vous avez les reins fragiles avec ces sels). Il est aussi possible d’utiliser l’huile de ricin. Je n’ai pas voulu choisir cette option, ayant un peu d’appréhension quant à la pratique. Le risque n’est pas inexistant si vous avez des calculs biliaires. C’est à mon sens une contre-indication, et si l’on ne sait pas… et bien pour moi on s’abstient ! donc je me suis abstenue ! 😉
Durant la première nuit le sommeil a été léger avec des réveils très fréquents.
J2 : Au matin du 2ème jour, je me suis réveillée bien avant l’aube avec une bonne énergie. Une légère sensation de faim au réveil a été calmée avec une tisane. Le premier rituel des matins était le lavage du nez (Jala neti, pratique courante en Inde) qui permet d’évacuer les mucosités qui pourraient être produites pendant le jeûne. Ensuite yoga doux, puis sauna (j’ai déjà moins supporté le froid que la veille en ayant plus de mal à me réchauffer après m’être aspergée d’eau froide du ruisseau dans le jardin entre chaque passage au sauna). Après un peu de repos, la balade de l’après-midi a en revanche réveillé la faim et j’ai commencé à ressentir certaines faiblesses. Durant l’atelier de réflexologie qui a suivi, je me suis même endormie pendant le soin. La prise de tisanes était de moins en moins efficace pour calmer cette sensation de faim (ou peut-être envie de manger mue par des besoins émotionnels ?).
Si la 2ème journée s’est plutôt bien déroulée pour moi, excepté le manque d’énergie, d’autres personnes du groupe ont expérimenté des nausées, de la fatigue, un petit malaise.
La deuxième nuit a été bien meilleure que la nuit précédente, néanmoins à chaque réveil, je sentais que mon rythme cardiaque était très accéléré (sans que ce soit des palpitations).

J3 : Je me suis retrouvée en bien petite forme au réveil de ce 3ème jour (il est classique qu’il y ait une baisse d’énergie à ce moment, le corps a épuisé toutes ses réserves de glycogène et va devoir utiliser d’autres voies métaboliques pour subvenir à ses besoins. C’est notamment à partir de ce moment que l’on commence à produire les fameux corps cétoniques). Ayant souvent été en hypotension par le passé, j’ai reconnu de suite les signes. Effectivement ma tension était bien basse, avec un rythme cardiaque accéléré (ce qui est normal, il n’y a plus assez de pression dans le système artériel, le cœur doit donc pomper plus vite). Pour d’autres personnes la nuit avait été difficile également et la plupart ont expérimenté une baisse de forme au matin de ce 3ème jour.
Néanmoins, après une séance de yoga doux, l’énergie est remontée. Par prudence, j’ai décidé de faire l’impasse ce jour-là sur les séances de sauna. Cela a été aussi le jour du lavement (autre grand moment, tout comme la purge !). 😉
Après une balade tranquille, nous avons réalisé un atelier de massage. Je dois avouer que prodiguer le massage à ma binôme (massage du dos) m’a bien fatiguée (et oui, masser demande beaucoup d’énergie !).
J4 : il parait que le plus dur est passé ! Même si mon organisme fonctionnait un peu au ralenti, je me sentais plutôt bien (j’avais en revanche l’impression d’être enceinte ! essoufflée au possible à chaque fois que je montais les deux étages menant dans les chambres !) La faim n’était plus vraiment présente et nous sommes devenues indifférentes à la vue et à l’odeur de nourriture (j’ai été surprise moi-même que cela ne me fasse pas envie). En revanche, moi qui consomme habituellement pas mal d’infusions, je commençais à saturer, et me suis tournée petit à petit plutôt vers de l’eau. Nous avons pratiqué le même genre d’activités que les autres jours. J’ai pu refaire des séances de sauna mais en évitant un choc chaud /froid trop brutal entre les séances.
J5 : Rupture du jeûne et reprise alimentaire.
Pourquoi je n’ai pas jeûné au-delà de 5 jours ? car je ne souhaitais pas perdre plus de poids (j’avais déjà perdu 5 kilos – dont 1 pendant la semaine de préparation) (poids que l’on reprend généralement de toute façon, sauf à ce que vous adoptiez de nouvelles habitudes alimentaires tranchant avec les habitudes antérieures). De plus, j’avais des consultations en cabinet le week-end et la semaine suivante était chargée au plan professionnel, je ne voulais donc pas prendre le risque d’être trop fatiguée, même si les jeûneurs (sous condition d’avoir une énergie suffisante en entrée de jeûne) ressortent souvent avec une super pêche !
Dans mon cas, les premières 24-48 heures après la reprise se sont passées au ralenti. L’énergie n’est vraiment revenue que lorsque j’ai réintroduit les féculents (patate douce puis riz blanc). Les deux premiers repas (légumes et huiles de qualité) ont même été un peu difficiles à digérer (je me suis rendue compte que c’était dû aux matières grasses, le temps que le système digestif se remette en route).
Pour la semaine de reprise, j’ai procédé à peu près dans le sens inverse de la descente (j’y reviendrai dans un article suivant), en prenant soin de prendre des jus de légumes lactofermentés et du pollen de ciste (tous deux sources de probiotiques), des graines germées (source d’enzymes), et de ne pas réintroduire trop prématurément des aliments susceptibles d’agresser la muqueuse intestinale.
Ce que j’attendais de ce jeûne :
- Comme je l’ai dit, je souhaitais l’expérimenter
- J’étais curieuse de voir la clarté mentale et l’activité cérébrale intense dont on parle beaucoup
- J’espérais permettre à ma muqueuse intestinale de se réparer et se restaurer pendant cette fenêtre, espérant voir mon hypersensibilité intestinale réduite à l’avenir.
Mon ressenti aujourd’hui, 10 jours après la fin du jeûne :
- J’ai repris le poids perdu (ce n’était donc probablement pas ou peu de masse grasse)
- Je n’ai pas eu l’occasion d’expérimenter pendant le jeûne la clarté mentale ou l’hyper acuité dont on parle parfois (peut-être le jeûne n’était-il pas assez long ? cette ultra performance du cerveau est a priori dû aux corps cétoniques, qui ne sont produits qu’à partir du 3ème jour).
- J’ai en revanche pu constater qu’effectivement, on dort souvent beaucoup moins !
- Si pendant le jeûne j’ai remarqué que ma peau du corps était plus sèche (élimination d’acides ?), après le jeûne, la peau du visage était éclaircie, le teint plus lumineux.
- Mon appétence pour le sucre s’est réduite (j’étais surtout attirée par des aliments salés au moment de la reprise)
- On redécouvre les saveurs et on se satisfait de choses très simples (si je vous disais combien j’ai apprécié un bol de riz avec de l’huile d’olive au petit déjeuner ! 😉
- Côté tolérance digestive, je n’ai malheureusement pas noté d’amélioration a posteriori. Là encore, la période de jeûne n’était peut-être pas suffisamment longue pour cela ?
- En revanche, j’avais depuis un certain temps assez régulièrement des acouphènes, j’ai noté qu’ils ont quasiment disparu.
- Je n’ai pu reprendre une activité sportive normale qu’après une semaine de reprise alimentaire.
- J’ai remarqué que mes muscles étaient plus laxes qu’avant le jeûne (je ne vais pas m’en plaindre !).
Est-ce que je réitérerai ? je ne sais pas. Si j’avais constaté des différences notoires, cela me motiverait sans doute (certaines personnes étaient là pour leur 2ème jeûne à 6 mois d’intervalle, car elles avaient constaté des bénéfices importants à posteriori). Cela a tout de même été pour moi trois semaines un peu en marge (et oui, l’alimentation est tout de même très sociale), et ce n’est pas forcément facile à mettre en place et concilier avec une vie « normale ».
Je suis en revanche contente d’avoir fait cette expérience… et de pouvoir en parler aujourd’hui ! Contente également d’avoir pu constater les bienfaits importants que cela a pu avoir chez certaines personnes ! Parmi les bénéfices que d’autres ont pu expérimenter : regain d’énergie, modification des habitudes alimentaires par la suite (les nombreux échanges avec Pierre et le/la naturopathe présent pendant la semaine sont très pédagogiques et chacun arrive souvent avec beaucoup de questionnements sur l’alimentation), réduction /disparition des troubles digestifs, réduction (pour l’instant même disparition) des allergies printanières (j’ai été bluffée sur ce plan, la personne concernée se reconnaîtra !), réduction de l’asthme…
Dans un prochain article, je vous parlerai de la mise en pratique concrète d’un jeûne hydrique long.
A voir ou revoir, l’excellent documentaire d’Arte « Le jeûne, nouvelle thérapie » réalisé par Thierry de Lestrade (je vous avais mis le lien vers youtube mais viens de me rendre compte qu’il n’est plus actif pour cause de droits d’auteur d’Arte).
Vous pouvez également lire cet article que j‘avais écrit au sujet du Jeûne.